On a longtemps cru que l’évangélisation avait effacé toute trace des pratiques religieuses autochtones. Or, des chercheurs de l’Université de Montréal affirment que les religions amérindiennes ne sont pas éteintes. Bien au contraire, elles évoluent en actualisant leurs traditions.
Selon l’ouvrage collectif Dynamiques religieuses des autochtones des Amériques « plusieurs systèmes religieux cohabitent au sein d’une même communauté, donnant lieu à des échanges et à des emprunts dans lesquels catholicisme, chamanisme, spiritualités panindiennes et pentecôtisme se juxtaposent ».
« Si on regarde au Québec, par exemple, la majorité des Amérindiens se disent chrétiens… Mais si on regarde de plus près, les gens parfois vont se définir avec une allégeance particulière, mais ça ne veut pas dire qu’ils vont être uniquement dans un seul courant. Il y a un va-et-vient », explique Marie-Pierre Bousquet, professeure au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal et coauteure du recueil.
Selon le professeur Bousquet, le chamanisme est la clé pour comprendre comment le christianisme est vécu par les différents peuples amérindiens. Il s’exprime dans l’attribution des noms de personnes et de lieux, dans la conception des rêves, dans les pratiques médicales, dans les relations avec les non humains et avec la nature en général. Le chamanisme comprend une approche pragmatique qui mène à l’adoption de pratiques issues de différentes religions, dit le professeur Bousquet.
« C’est une manière de penser le monde qui fait qu’on va adopter un rituel parce que, par vérification empirique, on voit que ça marche… Ce n’est pas important que ça vienne du catholicisme, du pentecôtisme ou autre. Est-ce que ça marche pour les gens? »
« Ce n’est pas important que ça vienne du catholicisme, du pentecôtisme ou autre. Est-ce que ça marche pour les gens? » – Marie-Pierre Bousquet, professeure au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal
Un exemple: lors de la canonisation de Kateri Tekakwitha, à Rome en octobre 2012, certains représentants autochtones qui participaient à la cérémonie étaient aussi promoteurs d’un retour à la spiritualité traditionnelle.
« C’est pas uniquement pour aller chercher du passé. C’est parce que ça a un sens aujourd’hui et pour l’avenir “ dit Marie-Pierre Bousquet
‘Des bases de dialogue communes’
Selon le professeur Bousquet, tous les peuples autochtones ont des bases de dialogue communes, car ils ont tous vécu la dépossession, la colonisation, l’évangélisation forcée. Ce ‘fond commun historique et social’ favorise le dialogue et les échanges de pratiques parfois inattendus.
Marie-Pierre Bousquet est professeure au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal et coauteure (avec Robert Crépeau) de l’ouvrage collectif Dynamiques religieuses des autochtones des Amériques, publié aux Éditions Karthala. Elle s’est entretenue avec Gilda Salomone sur différentes pratiques religieuses des autochtones.
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