L’histoire se passe dans le sud de la province de l’Alberta au pays des Indiens Blackfoot.
Une femme de la réserve Blackfoot de l’Alberta se retrouve à sa grande surprise devant les tribunaux après qu’elle ait eu troqué un peu de tabac et 250 dollars pour une aile d’aigle.
Rachel CrowSpreadingWings espérait utiliser cette aile pour orner les costumes de pow-wow (danse indienne) de sa famille. Mais elle devra plutôt répondre d’un chef d’accusation de trafic d’espèces sauvages et d’un chef d’accusation de possession en vue d’en faire le trafic.
Aide-mémoire
- Vendre ou posséder des parties d’un aigle est illégal en vertu de la Loi albertaine sur la faune.
- L’aigle représente une espèce sensible et la contrebande transfrontalière des parties de l’aigle est un sujet de préoccupation en ce moment.
- Pour de nombreuses Premières Nation de l’Amérique du Nord, les plumes d’aigles sont sacrées. Les plumes, les ailes et parfois les aigles en entier sont utilisés lors des cérémonies spirituelles et pour la décoration des vêtements traditionnels.
Un crime qui n’est pas pris à la légère même s’il s’agit d’une affaire de plumes
Selon surintendant de l’unité des crimes en matière de faune au ministère de la Justice de l’Alberta, Matt McCorquodale, si l’Amérindienne est reconnue coupable, elle pourrait recevoir une amende maximum de 100 000 $ ou de deux ans de prison. Elle pourrait aussi se voir imposer ces deux peines simultanément.
L’Alberta dispose d’un dépôt où les peuples autochtones peuvent demander et obtenir des plumes pour leurs cérémonies ou leurs autres activités culturelles. « La demande est forte, il n’y a pas de doute à ce sujet », fait observer le surintendant McCorquodale de l’unité des crimes en matière de la faune au ministère de la Justice.
Les plumes et les autres parties d’aigles peuvent coûter des milliers de dollars dans le marché noir. « Un aigle royal ou un aigle d’Amérique peut être vendu à 600 $, leur valeur augmente des dizaines de fois lorsqu’ils sont utilisés pour des coiffures ou vendus en artefacts à des collectionneurs européens ou asiatiques », assure M. McCorquodale.
La loi blanche et les traditions amérindiennes ne font pas bon ménage
Pour les Amérindiens Blackfoot, les objets de l’aigle sont sacrés.
Pour les Amérindiens, les plumes d’oiseau représentent un cadeau. Ces plumes d’aigle mènent leurs pensées et leurs prières vers le Grand Esprit. Avec le don d’une plume, nous recevons une partie de son essence. Ainsi quand une personne reçoit une plume d’aigle, c’est le cadeau le plus grande distinction honnorifique.
D’expliquer Rachel CrowSpreadingWings, « les plumes d’aigle ont toujours été considérées sacrées dans nos cérémonies et dans nos prières. Qu’y a-t-il de mal à donner de l’argent à quelqu’un pour recevoir en retour un objet sacré, si cela est fait dans le respect mutuel de cet objet et les personnes concernées savent que l’objet sera utilisé correctement? », se demande la femme de 32 ans.
Les circonstance de « son crime»
Rachel CrowSpreadingWings explique qu’en janvier 2013, elle avait été approchée par deux hommes, Craig et Donovan Jackson. Ces derniers lui auraient proposé d’acquérir une aile d’aigle qui contenait environ une centaine de plumes, selon elle. Les deux hommes lui auraient expliqué avoir appris d’un aîné comment préparer cet objet.
Convaincue, elle aurait accepté l’offre et donné en échange du tabac et de 250 $ en espèces. Le tabac représente un cadeau couramment donné dans les réserves autochtones en échange d’une aile et la somme d’argent était censée aider les deux hommes à payer leur épicerie et leur billet d’autobus pour rentrer chez eux, dans la réserve cri du lac Saddle, précise la jeune femme.
Craig Jackson a déjà été condamné à une amende de 7000 $ après avoir plaidé coupable de trafic d’espèces sauvages. Donovan Jackson se trouve encore devant les tribunaux. Il n’a pas encore présenté de plaidoyer.
Les aînées appuient Rachel CrowSpreadingWings
Des aînés de la Nation Kainai, y compris le conseiller spirituel Allen Eli-Wolf, ont accompagné Rachel CrowSpreadingWings aux audiences judiciaires pour lui témoigner de leur soutien. « Elle ne voulait pas faire du profit. L’idée était d’aider quelqu’un. Elle n’a rien fait de mal », soutient Allen Eli-Wolf.
Il rappelle que le troc a toujours fait partie de la culture Blackfoot et que l’argent est aussi utilisé actuellement comme un moyen de faire des cadeaux à des personnes spirituelles.
CrowSpreadings étudie le journalisme au Collège de Lethbridge. Jusqu’à présent, cette mère monoparentale de deux enfants se défend sans avocat devant le tribunal.
Elle a refusé l’arrangement judiciaire que la Couronne lui a proposé. « Je n’ai pas l’intention de dire que la province un droit de regard sur notre vie traditionnelle », explique-t-elle.
D’après un reportage de Duncan McCue de CBC Aboriginal
Liens externes
Rachel CrowSpreadingWings fights charges of trafficking eagle feathers – CBC
Les Indiens Blackfoot – Les indiens d’Amérique du Nord – Wikipédia
Espèces en péril – Gouvernement du Canada
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Noirs et Autochtones surreprésentés dans les prisons canadiennes Écoutez
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