Indiens avec ou sans statut : quelques mythes à déboulonner
Photo Credit: PC / Darryl Dyck

Indiens avec ou sans statut : quelques mythes à déboulonner

Jusqu’aux années 60, les manuels d’histoire diffusés dans les écoles québécoises véhiculaient une image peu reluisante des peuples autochtones. C’est le cas en particulier du manuel rédigé par les pères Farley et Lamarche et qui a connu un grand succès au Québec.

Tenez, en voici un exemple percutant

« Le sauvage américain était d’ordinaire fortement constitué au physique. Sa taille était élevée, ses muscles vigoureux, ses sens doués d’une grande acuité. Malgré la dureté de ses traits et l’aspect osseux de sa figure, il présentait souvent dans l’ensemble une belle apparence. Il se peignait le corps et la figure de dessins bizarres, qu’il faisait adhérer à la peau au moyen de procédés souvent très douloureux. Ce tatouage servait d’ornement et protégeait contre le froid.

« Au moral, le sauvage possédait certaines qualités peu profondes, qui le firent cependant apprécier des blancs. Ainsi il endurait volontiers les privations, le froid, la faim; devant la mort il manifestait souvent un courage digne d’admiration. Il exerçait l’hospitalité de la manière la plus cordiale. Il se montrait sensible aux misères et aux souffrances de ses voisins; il leur offrait volontiers le secours de ses propres biens.

« Mais ces qualités ne pouvaient faire oublier les défauts les plus graves. Le sauvage avait en effet un orgueil sans bornes. Il se croyait nettement supérieur aux blancs et cette disposition d’esprit l’empêchait souvent d’accepter la civilisation et l’Évangile…

« … Le sauvage était sensuel. Il se livrait facilement à la débauche. Son goût pour les boissons alcooliques fut encore un des principaux obstacles à l’action des missionnaires. Enfin, il était sans force morale, sans caractère… »

Farley et Lamarche, 1945 : 13-14

Ce manuel d’histoire, publié originellement en 1934, est devenu après la Seconde Guerre mondiale presque la seule Histoire du Canada, l’officielle.

Au Canada, La Loi sur les Indiens est la principale loi qui permet au gouvernement fédéral d’administrer les Indiens, les gouvernements locaux des Premières Nations et la gestion des terres des réserves et des fonds communautaires. Elle est introduite en 1876 sous la forme d’une synthèse de plusieurs ordonnances coloniales antérieures visant à éradiquer la culture des Premières Nations et à promouvoir l’assimilation de leurs membres dans la société eurocanadienne. La Loi a été modifiée plusieurs fois, de manière notable en 1951 et en 1985, les modifications consistant principalement à éliminer les articles particulièrement discriminatoires.

Source, l’encyclopédie canadienne

Donc, c’est cette loi qui permet de dire qui est « Indien» et qui ne l’est pas?

En fait, non. Elle permet de fait de reconnaître le statut de membre d’une première nation au Canada, mais elle ne rend pas tous les autochtones éligibles au statut officiel ou encore à l’éducation supérieure gratuite.

Histoire de tenter de déboulonner certaines faussetés entourant le statut d’Indien au Canada, voici quelques faits à prendre en compte

gouvernement du Canada

gouvernement du Canada

Ce ne sont pas tous les autochtones au Canada qui possèdent le statut d’indien

La Loi sur les Indiens ne s’applique qu’aux Indiens avec statut, malgré le fait que les Métis et les Inuit soient effectivement des autochtones canadiens, mais qui ne sont pas reconnus « historiquement et légalement » comme tels.

Il y a également d’innombrables raisons qui font qu’un indien ne puisse disposer du statut.

Pour en avoir une idée, jetez un coup d’œil sur l’article 5 de la Loi sur les Indiens – Registre des Indiens

Enraciné dans l’assimilation

Quand la catégorie de citoyens canadiens « Indiens avec statut » a été créée, elle l’a été selon des politiques fédérales d’assimilation et de « civilisation » de ces personnes, la même politique qui a permis de mettre sur pied les terribles écoles résidentielles pour « déindienniser les sauvages ».

En fait, le concept originel tendait vers ladite civilisation des Indiens, ceux-ci perdraient alors leur statut en se fondant dans la société canadienne.

De plus, si un indien avec statut sevrait dans les Forces canadiennes, obtenait un diplôme universitaire ou devenait un médecin ou un avocat, le statut d’indien lui était alors retiré.

Charte de définition du statut (http://apihtawikosisan.com/)

Charte de définition du statut (http://apihtawikosisan.com/)

Un statut inscrit selon des critères raciaux et de genre

Avant 1985, si une femme indienne avec statut épousait un non- Indien, ou un Indien sans statut, elle perdait le sien et les enfants issus de cette union ne l’obtenaient pas.

Dans le cas d’un homme avec statut, cette règle ne s’appliquait pas. Même que son épouse sans statut l’obtenait pas mariage!

Il a fallu attendre la Loi C-31 et la Charte des Droits et Libertés pour mettre un terme à cette discrimination.

Pas d’impôt à payer et l’université gratuite? Un instant!

Deux mythes entourant le statut d’indien reconnu ont la vie dure et teintent grandement la perception qu’ont les Canadiens blancs des Indiens en général.

Dans les traités signés avec les nations amérindiennes après la Confédération canadienne de 1867, l’éducation est inscrite comme droit constitutionnel.

Par contre, le droit à l’éducation postsecondaire gratuite ne s’applique ni aux Métis ni aux Inuit (encore une fois) ni aux Indiens sans statut.

En ce qui a trait aux taxes et impôts, si un Indien avec statut vit et travaille à l’extérieur de la réserve où il vit, il paie taxes et impôts au même titre que tous les autres Canadiens.

En passant, plus de la moitié des Indiens avec statut au Canada travaillent hors réserve.

L’exemption de taxes et d’impôts ne s’applique que dans des conditions très strictes et limitées à l’activité économique en réserve.

Un statut à problème dans son concept même

Bien que les bandes et nations ont le pouvoir de déterminer qui est ou n’est pas membre, le ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada versent les fonds aux bandes en ne se basant que sur le nombre d’Indiens avec statut qui y sont inscrits et non pas sur l’ensemble des membres.

Pour en savoir plus :

Mythes et réalités sur les peuples autochtones

Pierre Lepage, Direction de l’éducation et de la coopération, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec

RCI, apihtawikosisan.com, Howard Adler, cinéaste, CBC, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec

Catégories : Autochtones, Économie, Politique, Société
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