Les négociations des prochains jours entre Canadiens et Américains s’annoncent particulièrement dangereuses pour la survie du système canadien de gestion de l’offre des produits laitiers.
Des coups devraient être échangés cette semaine dans ce qui s’annonce comme une lutte acharnée au sujet du système de gestion de l’offre, qui protège l’industrie laitière au Canada, dans le cadre du troisième tour des négociations sur l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) à Ottawa.
Le lobby américain des produits laitiers réclame l’élimination pure et simple du système de gestion de l’offre, qui frappe les importations américaines d’un droit de douane de 270 %. Il affirme avoir le soutien du gouvernement des États-Unis.
L’industrie laitière canadienne affirme que ce système est essentiel à sa survie et elle accuse pour sa part les États-Unis de verser des subventions inéquitables à ses producteurs agricoles. Elle jure de protéger ce système.
Selon Yves Leduc, directeur des politiques internationales pour les Producteurs laitiers du Canada, la loi américaine accorde des milliards de dollars par année en subventions et en soutien aux agriculteurs.
Les États-Unis affirment vouloir un marché entièrement libre et sans aucun tarif
Le vice-président de la Fédération nationale américaine des producteurs laitiers, Jaime Castaneda, répète que les producteurs américains ont longtemps toléré la gestion de l’offre, mais que le Canada était allé trop loin en créant une nouvelle catégorie pour le lait diafiltré récemment. Comme il s’agit d’un nouveau produit, il n’est pas soumis aux tarifs de l’ALENA en vigueur, alors les producteurs américains ont commencé à en exporter à prix réduit aux transformateurs alimentaires canadiens.
Les producteurs de lait du Canada se sont plaints de la situation, déclarant perdre des revenus de 200 millions par année. L’industrie laitière canadienne a alors trouvé une entente avec le Canada pour vendre sa propre protéine de lait à prix réduit en échange de la création d’une nouvelle catégorie dans la gestion de l’offre. Ce qui vient barrer la route aux exportateurs américains.
Négociations de l’ALENA : au tour des détaillants canadiens de s’inquiéter
Le Canada impose actuellement des droits à tout bien valant plus de 16 $ US afin de protéger ses détaillants. Les responsables américains souhaitent toutefois gonfler à 800 $ US la limite hors-taxe, ce qui multiplierait le nombre de biens de consommation qui traversent la frontière vers le nord.
Les détaillants canadiens craignent d’être matraqués si les États-Unis obtiennent cette modification à l’ALENA. Il s’agit d’un enjeu qui sème une réelle panique parmi les détaillants canadiens qui craignent de voir leurs clients les abandonner au profit de géants américains en ligne.
« Les détaillants canadiens ne seraient plus qu’une salle d’exposition, affirme Larry Rosen, le chef de la direction de la chaîne de vêtements pour hommes Harry Rosen. Les gens vont venir trouver ce qu’ils aiment et ensuite ils vont commander en ligne sans les taxes de vente ou les droits de douane. »
Un porte-parole du Conseil canadien du commerce de détail, Karl Littler, prévient qu’une hausse de la limite hors-taxe « inciterait à magasiner pratiquement n’importe où, sauf au Canada ».
M. Rosen compare le tout à rivaliser avec une gigantesque boutique hors-taxe. Personne, dit-il, ne sera assez fou pour acheter un complet Zegna dans un de ses magasins si l’on peut l’avoir moins cher dans une compagnie américaine qui domine le commerce en ligne.
Amazon et eBay comptent parmi ceux qui réclament une hausse du plafond hors-taxe, qui compte parmi les plus stricts du monde industrialisé, mais les deux entreprises ont refusé de commenter la situation.
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L’histoire de l’ALENA et les renégociations en cours avec l’administration Trump
Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump et de sa rhétorique (les États-Unis d’abord), ce traité est mis à mal par son administration comme étant désavantageux pour son pays. Mais qu’en est-il vraiment et comment le Canada doit-il se positionner pour espérer conclure un nouvel accord acceptable pour tous?
RCI avec La Presse canadienne et l’Associated Press
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