La pauvreté infantile, présente partout au Canada, touche plus durement les groupes minoritaires. Selon un nouveau rapport de Campagne 2000, les circonscriptions fédérales où la pauvreté des enfants et des familles est la plus élevée sont celles qui abritent une plus grande proportion de communautés autochtones, racialisées et immigrantes et des familles monoparentales dirigées par des femmes.
À la veille de la divulgation de la première stratégie canadienne de réduction de la pauvreté, l’ONG Campagne 2000 dresse un portrait de la pauvreté infantile dans les circonscriptions fédérales. Et le constat est sans appel. La pauvreté infantile existe dans toutes les circonscriptions. Mais elle est criante dans les régions rurales habitées surtout par des Autochtones et dans des zones urbaines où sont concentrés des groupes « racisés », entendez des non-caucasiens.
Selon Campagne 2000, il existe au Canada une persistance de la discrimination et des inégalités systémiques. Ainsi, dans des circonscriptions habitées majoritairement par des autochtones, le taux de chômage plus élevé, on note une faible participation au marché du travail et des locataires (et non des propriétaires) y sont plus nombreux. Ils consacrent plus de 30 % de leur revenu au logement.
Ainsi, la circonscription qui a le triste privilège d’afficher le taux de pauvreté infantile le plus élevé est celle de Churchill-Keewatinook Aski, au Manitoba, où vivent de nombreux Autochtones. Plus de six enfants sur dix (64,2 %) sont en situation de pauvreté. En plein cœur de la plus grande ville canadienne, Toronto, 4 enfants sur 10 (40 %) vivent en situation de grande précarité, alors qu’ils sont dans une circonscription urbaine qui regroupe le secteur bien nanti de la rue Bay, où se trouvent les tours de quatre des cinq principales banques canadiennes. On y trouve aussi de nombreux sièges sociaux de sociétés de courtage, de compagnies d’assurances, d’études légales et la Bourse de Toronto.
Pour Campagne 2000, la pauvreté infantile n’est pas une fatalité. Elle ne relève pas non plus de mauvais choix individuels. Dans un pays riche comme le Canada, insiste l’ONG, « aucun enfant ne devrait se coucher le ventre creux. Aucun parent ne devrait avoir à choisir entre payer son loyer et acheter des médicaments ou refuser de travailler ou de suivre des cours faute de services de garde de qualité et abordables. Comme la pauvreté touche toutes les circonscriptions, elles bénéficieront toutes d’une stratégie fédérale robuste ».
Un chantier collectif
Ottawa n’est pas resté les bras croisés sur la question de la pauvreté infantile. Campagne 2000 réclame depuis des décennies un plan fédéral de lutte contre la pauvreté. Ces dernières années, nous nous sommes réjouis des diverses mesures qui ont été adoptées pour soutenir les familles à faible revenu, notamment l’Allocation canadienne pour enfants, les investissements dans les services de garde et le logement et l’Allocation canadienne pour les travailleurs. Et Campagne 2000 s’en félicite.
L’organisme constate toutefois que la bataille contre la pauvreté au Canada est loin d’être gagnée. Et tout le monde devra mettre la main à la pâte selon Sid Frankel de l’Université du Manitoba. Pour que la nouvelle stratégie fédérale de réduction de la pauvreté tienne ses promesses, dit-il, les deux ordres de gouvernement, les villes et les Premières nations, ainsi que les secteurs privés et à but non lucratif, devront tous mettre l’épaule à la roue »
M. Frankel précise qu’Ottawa devra assumer un rôle de leadership spécial. Il doit fixer les objectifs, les échéanciers et les conditions pour les programmes de réduction de pauvreté fournis par les provinces et les territoires et auxquels il contribue des fonds. Il doit aussi prendre des mesures fiscales susceptibles d’inciter les provinces et les territoires à mettre en place des programmes audacieux.
L’ONG demande en outre qu’une loi sur la réduction de la pauvreté soit adoptée avant les élections de 2019. Elle voudrait également qu’Ottawa bonifie les transferts fédéraux, qu’il mette en place un système universel de services de garde et qu’il fournisse des logements pour tous, etc.
Campagne 2000 est un réseau pancanadien d’organismes nationaux, provinciaux, territoriaux et communautaires qui a vu le jour en 1991, en réaction à l’absence de progrès du gouvernement dans la lutte contre la pauvreté des enfants.
- En 2015, près de 1,2 million d’enfants canadiens de moins de 18 ans (17 %) vivaient dans un ménage à faible revenu.
- Les enfants dont la famille partageait un logement avec d’autres personnes étaient moins susceptibles de vivre dans un ménage à faible revenu, en particulier ceux qui vivaient dans une famille monoparentale.
- Le plus faible taux d’enfants vivant dans un ménage à faible revenu a été observé en Alberta, où l’emploi et le revenu médian sont élevés. Par ailleurs, le Québec était la seule province où les enfants étaient moins susceptibles de vivre dans un ménage à faible revenu que les adultes, en raison de prestations gouvernementales élevées pour les familles comptant des enfants.
- Parmi les grands centres urbains, Windsor, en Ontario, a inscrit le taux d’enfants vivant dans un ménage à faible revenu le plus élevé.
- Le taux de faible revenu observé chez les enfants vivant dans une famille biparentale ne comptant aucun autre enfant de moins de 18 ans était de 9 % en 2015. Ce taux augmentait considérablement chez les enfants vivant dans une famille biparentale comptant au moins trois enfants, pour atteindre 16,4 %.
- Parmi les enfants vivant dans une famille monoparentale, le taux de faible revenu se situait à 30,5 % lorsque la famille ne comptait qu’un seul enfant, alors qu’il augmentait pour s’établir à 37,2 % lorsque la famille comptait deux enfants, et à 55,1 % lorsque la famille comptait trois enfants ou plus.
(Source: Statistique Canada)
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