Un nouveau rapport de Statistique Canada sur les inconduites sexuelles dans l’Armée canadienne révèle un phénomène qui persiste, malgré les multiples efforts déployés pour tenter de le juguler.
Pas de grands changements en quatre ans
Les chiffres de ce nouveau rapport demeurent très proches de ceux de 2016 sur ce même fléau au sein des Forces armées canadiennes.
Les inconduites sexuelles n’ont pas cessé et touchent plus les femmes que les hommes, et plus les réservistes que les membres des Forces régulières.
Si la situation préoccupe les hauts responsables de l’armée, ces derniers semblent tout simplement dépassés par les événements, et ne savent pas comment expliquer une telle situation. Maintes fois questionnés par les journalistes depuis la sortie du rapport, ils ont déclaré ne pas savoir quelles explications donner.
Il existe pourtant toute une panoplie de possibilités pour les victimes qui souhaitent faire une dénonciation. Elles peuvent notamment faire appel au Centre d’intervention, mais n’osent pas le faire.
« 84 % ne font pas appel à des services. C’est dur à répondre. Ce résultat démontre qu’il faut encore beaucoup communiquer sur cette question », a déclaré le vice-chef d’état-major de la défense, le lieutenant-général Paul Wynnyk, à Radio-Canada.
« Nous sommes en train d’analyser les conclusions pour déterminer la meilleure façon d’intervenir », a-t-il ajouté.
Absence de dénonciation : processus de plainte décourageant ou crainte de stigmatisation?
D’après Statistique Canada, plusieurs réservistes ont affirmé qu’elles ont été impliquées dans des incidents d’inconduites sexuelles avec des superviseurs. Mais dans les Forces armées canadiennes en général, les victimes d’agressions sexuelles l’ont été plus de la part des pairs que des superviseurs.
Yvan Clermont, de Statistique Canada, explique qu’autant de femmes que d’hommes ont reconnu que les mesures pour lutter contre les inconduites sexuelles se sont améliorées dans l’armée depuis la mise sur pied de l’opération HONOUR.
Dans la Première réserve, la proportion des femmes qui ont déclaré ne pas faire appel aux services pour dénoncer une agression a augmenté.
Si les victimes ne dénoncent pas, c’est généralement parce qu’il faut respecter tout un processus de plaintes formelles parfois long.
« Elles ont surtout peur des représailles et la réponse la plus courante est qu’elles ont réglé le problème elles-mêmes », a souligné M. Clermont.
La proportion est plus élevée chez les femmes qui craignent les conséquences que chez les hommes, constate le rapport.
Plus de 36 000 membres des Forces armées canadiennes de la force régulière et de la Première réserve ont répondu au sondage, soit 44 % de l’effectif des FAC.
1,6 % d’incidents pour l’ensemble des Forces armées contre 1,7 % en 2016, dont 51 % d’incidents impliquant un superviseur.
2,2 % des membres de la Première réserve ont déclaré avoir été agressés sexuellement en milieu de travail militaire au cours des 12 derniers mois.
Les attouchements sexuels constituent la forme d’agression sexuelle la plus courante et représentent 88 % des incidents au sein des forces régulières, et 86 % au sein de la Première réserve.
Prévalence des agressions sexuelles chez les femmes des Forces armées canadiennes plus élevée que celle des hommes : 4,3 % contre 1,1 %.
Dans la Première réserve, ce sont toujours les femmes qui sont les plus concernées par les agressions sexuelles : 7,0 % contre 1,2 % chez les hommes.
Témoins ou victimes de comportements sexualisés ou discriminatoires en milieu de travail : 70 % des membres des Forces armées régulières contre 71 % des membres de la Première réserve, par rapport à 80 % de la Force régulière et 82 % de la Première réserve en 2016.
Blagues à caractère sexuel : 65 % des membres des Forces régulières et des membres de la Première réserve ont dit les avoir vécus ou observés. C’est le type de comportements sexualisé ou discriminatoire le plus couramment observé ou vécu.
Sensibilisation à l’égard de l’opération HONOUR : 94 % des membres des Forces armées régulières, et 91 % des réservistes se disent bien sensibilisés.
Efficacité de l’opération HONOUR durant la période de l’enquête : 45 % des membres des deux groupes sont d’accord.
Efficacité à l’avenir de l’opération HONOUR : 49 % chez les Forces régulières, contre 51 % du côté de la Première réserve, soit une hausse importante par rapport à 2016, où l’on avait 32 % dans le premier cas et 29 % dans le second.
Prise au sérieux des plaintes : 94 % des membres des Forces régulières estiment que les plaintes à propos des comportements sexuels inappropriés sont ou (seraient) prises au sérieux au sein de leur unité actuelle, contre 84 % pour la Première réserve.
Source : ministère de la Défense et Statistique Canada
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